Les conséquences de la fixation d’objectifs irréalisables
La Cour de Cassation, rappelle dans un arrêt en date du 6 octobre dernier, que la fixation d’objectifs irréalisables peut justifier la rupture du contrat aux torts de l’employeur.
Dans cette affaire, une salariée occupant les fonctions d’ingénieur commercial a sollicité la résiliation judiciaire de son contrat de travail avant d’être licenciée quelques mois plus tard pour insuffisance professionnelle.
L’entreprise l’employant avait largement modifié le plan de commissionnement des commerciaux ce qui avait eu pour conséquence de faire fortement baisser la part variable de leur rémunération. Afin de corriger artificiellement ce nouveau plan, l’entreprise avait eu recours à un système de bonus mais en fixant des objectifs qui n’étaient pas réalisables. La Cour de cassation considère alors que la salariée a pu en déduire un manquement d’une gravité suffisante rendant impossible la poursuite du contrat de travail, justifiant ainsi la résiliation judiciaire aux torts de l’employeur.
Soc. 6 octobre 2016 n° 15-15672
La CFTC Cadres en profite pour rappeler que juridiquement, les objectifs peuvent relever de l’employeur et de ses choix de gestion. Il peut en effet fixer seul les objectifs d’un salarié, sans les négocier avec lui (mais il peut aussi décider de les contractualiser après une négociation avec le salarié). Dès lors que les objectifs sont fixés unilatéralement par l’employeur, celui-ci peut également les modifier unilatéralement. Cependant, ces objectifs doivent impérativement respecter certaines conditions :
- Etre réalisables : l’employeur doit fixer des objectifs qui sont atteignables. L’inverse reviendrait en effet à lui permettre de s’exonérer du versement de cette partie variable.
- Etre portées à la connaissance du salarié en début d’exercice : la transparence est ici essentielle afin de mettre les salariés en mesure de pouvoir remplir les objectifs fixés.
La solution dégagée par la Cour de cassation, dans cet arrêt du 6 octobre, n’est pas nouvelle. En effet, il a déjà été jugé que lorsque les contrats de travail prévoient que la rémunération variable dépend d’objectifs fixés unilatéralement par l’employeur, le défaut de fixation de ces objectifs constitue un manquement justifiant la prise d’acte de la rupture par le salarié, aux torts de l’employeur (Soc. 29 juin 2011 n° 09-65710). Il a également été jugé que le salarié aura droit à l’intégralité de sa rémunération variable annuelle si l’employeur met fin son contrat de travail alors qu’il n’existait aucun moyen concret de calcul, d’objectifs actuels ou passés, et de période de référence pour le versement de la prime (Soc. 10 juillet 2013 n° 12-17921).
Rappelons également que lorsque le salarié est titulaire d’un mandat représentatif, la prime d’objectif doit être adaptée en fonction des heures qu’il consacre effectivement à l’exécution de ses obligations contractuelles. De plus, le montant de sa prime doit être identique à celle prévu pour les autres salariés. Il doit ainsi percevoir pour la partie de son activité correspondant à ses mandats une somme égale au montant moyen de la prime versée, pour un temps équivalent, aux autres salariés.