► Mesures de protection de la femme enceinte contre les discriminations
La grossesse est un des 19 critères de discrimination interdite par l’article L. 1132-1 du Code du travail et par l’article 225-1 du Code pénal.
L’article L. 1225-1 c. trav. rappelle que « l’employeur ne doit pas prendre en considération l’état de grossesse d’une femme pour refuser d’embaucher, pour rompre son contrat de travail au cours d’une période d’essai […] ou pour prononcer une mutation d’emploi
Il lui est en conséquence interdit de rechercher ou de faire rechercher toutes informations concernant l’état de grossesse de l’intéressée ».
L’article L. 1225-1 c. trav. dispose en outre que la salariée ou la candidate « n’est pas tenue de révéler son état de grossesse, sauf lorsqu’elle demande le bénéfice de dispositions légales relatives à la protection de la femme enceinte ».
L’article L. 1142-1, 2° du même code prévoit quant à lui que « nul ne peut refuser d’embaucher une personne en considération du sexe, de la situation de famille ou de la grossesse ».
Il résulte de ces textes que le candidat à l’embauche bénéficie d’un droit au silence (presque un droit de mentir indirectement par omission) sur sa situation de famille ou de grossesse. A l’inverse, il est interdit à l’employeur de s’y référer ou de prendre une mesure basée sur l’état de grossesse de sa salariée.
► Mesures de protection de la femme enceinte pendant son travail
A partir du début de la grossesse et jusqu’à 6 semaines avant la date présumée de l’accouchement, la salariée peut être dispensée d’exécuter une partie de sa tâche habituelle. Pour bénéficier de cette dispense partielle, la salariée enceinte doit en informer son employeur en lui remettant un certificat médical attestant de son état de grossesse et la date présumée de son accouchement.
Pendant sa grossesse, la salariée enceinte bénéficie de plusieurs mesures de protection :
– Interdiction du travail de nuit (art. L. 1225-9 c. trav.).
– Aménagement de poste : la salariée enceinte a la possibilité d’être affectée temporairement dans un autre emploi en cas de nécessité médicale (article L. 1225-7 c. trav.) ou d’exposition à des risques particuliers (art. L. 1225-12 c. trav.). Ce changement d’affectation ne doit pas entrainer de diminution de rémunération pour la salariée.
– Possibilité de réduire le temps de travail : la majorité des conventions collectives accordent aux femmes enceintes la possibilité de réduire, sans perte de salaire, leur temps de travail.
– Autorisations d’absence : l’article L. 1225-16 c. trav. fait bénéficier à la salariée enceinte d’une autorisation d’absence pour se rendre aux examens médicaux obligatoires. La salariée continue d’être rémunérée et ses absences sont considérées comme des périodes de travail effectif.
– Bénéfice d’un congé maternité pendant une période prénatale et postnatale.
– Interdiction d’utiliser certains produits dangereux (rayons ionisants, agents chimiques dangereux…).
– Interdiction d’emploi prénatal et postnatal : interdiction est faite à l’employeur de faire travailler une salariée enceinte pendant une période de huit semaines au total avant et après son accouchement (art. L. 1225-29 c. trav.) dont six après l’accouchement.
– Absence de préavis en cas de démission de la salariée. Celle-ci peut rompre son contrat sans préavis et sans devoir d’indemnité de rupture. A l’inverse, le licenciement d’une salariée enceinte est rendu plus difficile (procédure plus stricte, voir ci-dessous)
► Bénéfice du congé maternité
La mère qui enfante bénéficie du congé maternité dont la durée peut varier (voir développement ci-dessous). Celle qui adopte également mais pour une durée inférieure (10 semaines pour un enfant et 23 semaines pour une adoption multiple).
La durée du congé maternité dépend du nombre d’enfants attendus et du nombre d’enfants déjà nés :
– Lorsque la salariée attend la naissance d’un premier ou second enfant, le congé maternité dure 16 semaines, généralement réparties ainsi : 6 semaines de congés avant la date présumée d’accouchement et 10 semaines pour la période postnatale (art. L. 1225-17 c. trav.). Cette répartition est cependant modulable dans une certaine mesure (avec avis d’un professionnel de santé).
– Lorsque la salariée attend une naissance multiple, le congé maternité est allongé (art. L. 1225-18 c. trav.) pour atteindre 34 semaines en cas de jumeaux et 46 semaines en cas de triplés.
– Lorsque la salariée a déjà deux enfants, le congé maternité atteint 26 semaines (art. L. 1225-19 c. trav.).
Le père n’est pas exclu de ces dispositions puisque l’article L. 1225-35 c. trav. lui accorde également un « congé de paternité et d’accueil de l’enfant » de 11 jours consécutifs ou 18 jours en cas de naissances multiples. Ce congé doit être pris dans les 4 mois suivant la naissance de l’enfant.
Naissances simples |
Durée du congé maternité avant la date présumée de l’accouchement |
Durée du congé maternité après l’accouchement |
Durée totale du congé maternité |
1er et 2nd enfant | 6 semaines | 10 semaines | 16 semaines |
3ème enfant ou plus | 8 semaines | 18 semaines | 26 semaines |
Naissances multiples |
Durée du congé maternité avant la date présumée de l’accouchement |
Durée du congé maternité après l’accouchement |
Durée totale du congé maternité |
Jumeaux |
12 semaines |
22 semaines |
34 semaines |
Triplés ou plus |
24 semaines |
22 semaines |
48 semaines |
▲ Attention, certaines règles du congé maternité sont susceptibles de changer avec la loi égalité femmes-hommes en cours d’adoption au Parlement au moment ou nous écrivons cet article.
► Protection de la salariée pendant le congé maternité
Pendant le congé maternité, le contrat de travail de la salariée est suspendu.
● Maintien du salaire
La suspension du contrat de travail entraine normalement la suspension du paiement du salaire. La loi ne fait pas obligation à l’employeur de maintenir durant cette période tout ou partie du salaire. Mais très souvent, cette obligation est prévue par les conventions ou accords collectifs de branche ou les usages.
Surtout, le congé maternité, le congé adoption et le congé paternité ouvrent droit aux indemnités journalières de sécurité sociale pendant toute la durée légale du congé. L’intéressée doit remplir plusieurs conditions posées par les art. L. 331-3 et suivants du code de la sécurité sociale (notamment être immatriculé, avoir travaillé antérieurement et cesser toute activité professionnelle).
Cette indemnité appelée indemnité journalière de repos est égale au gain journalier de base calculé en fonction des salaires des 3 derniers mois (dans la limite du plafond de sécurité sociale, moins les cotisations salariales et la CSG qui représentent près de 21 %).
Le montant maximum au 1er janvier 2014 de l’indemnité journalière maternité est de 81,27 € par jours. Le montant minimum est de 9,20 € par jours. Cependant, le contrat de travail ou la convention collective applicable peuvent prévoir des conditions d’indemnisation plus favorables que celles de la sécurité sociale, pouvant aller jusqu’au maintien intégral du salaire.
● Protection contre le licenciement
L’article L. 1225-4 c. trav. impose non seulement l’interdiction de licencier la femme enceinte pendant sa grossesse et son congé maternité en raison de son état de santé, mais également pendant une période postérieure. La législation interdit donc le licenciement d’une salariée à partir du constat médical de la grossesse, pendant la suspension de son contrat de travail ; puis pendant la période de suspension du contrat de travail, peu important qu’elle use de son droit ; enfin, jusqu’à 4 semaines suivant l’expiration de la période de suspension. Cette règle d’ordre public s’impose à tous les employeurs, y compris les particuliers, et quel que soit le contrat de travail (CDD ou CDI).
La seule condition pour bénéficier de cette protection est d’informer son employeur (si ce n’est déjà fait) sur son état de grossesse par l’envoi d’un certificat médical justifiant l’état de grossesse dans les quinze jours suivant la notification du licenciement (art. L. 1225-5 c. trav.).
Lorsqu’un licenciement est néanmoins prononcé à l’encontre de la salariée enceinte en méconnaissance de ces articles, le licenciement est nul (art. L. 1132-1 et L. 1132-4 c. trav.). La salariée peut alors demander sa réintégration dans son emploi ou dans un emploi équivalent. A défaut de demander sa réintégration, l’article L. 1225-71 c. trav. offre à la salariée dont le licenciement est nul et qui ne demande pas sa réintégration une indemnité réparant intégralement le préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et dont le montant est au moins équivalent aux 6 derniers mois de salaires.