Le 09 février 2018 la DARES a publié une étude intitulée « les femmes dans les instances représentatives du personnel : bientôt la parité ? » ayant comme champ les élections professionnelles du comité d’entreprise ou d’établissement ou de la délégation unique du personnel du cycle électoral de 2009 à 2012 des entreprises du secteur marchand non-agricole.
De cette étude ressort un bilan global plutôt positif.En effet, il apparaît que ce secteur est composé dans son ensemble de 43 % de femmes et ces dernières représentent 38 % des candidates et 40 % des élus. Cela représente une augmentation de 7 points par rapport au cycle électoral de 2000 qui s’explique notamment par l’accroissement de la présence même des femmes dans les sociétés en général.
Pour autant on constate que cet accroissement est inégal selon le secteur, principalement car il reste des secteurs ou le niveau de féminisation de la main-d’œuvre est encore très faible. Ainsi dans la construction, seuls 14,7 % des élus sont des femmes. Malgré la faiblesse apparente de ce chiffre, il est pourtant de 5 point supérieur à la proportion de salariées dans ce secteur (10,5 %) et a pratiquement doublé en 10 ans, puisqu’il était alors de 8 %.
Au sein de l’enseignement, de la santé et de l’action sociale, en revanche, si les femmes représentent 73 % des salariés elles restent sous-représentées parmi les élus (67,1 %).
Mais avant même d’être élue, il ressort de l’étude que les femmes sont sous-représentées au niveau des candidatures, excepté dans les secteurs de la construction et de l’information et communication.
Cela traduit de la sous-représentation des femmes dans certains métiers. C’est un premier obstacle ne permettant dès lors pas, en amont, une potentielle mixité au sein des élections professionnelles. (Tableau 1)
Si le secteur a un impact, la catégorie professionnelle aussi. La DARES relève que le nombre de femme dans le collège « employé et ouvrier » a progressé entre 2001 et 2012 passant de 37 % à 42 %, alors même que le taux de femme dans cette catégorie est resté stable (44 %) contrairement au collège des cadres ou elles ne représentent que 28 % des élus alors qu’elles équivalent à 34 % des salariés cadres.
Enfin l’appartenance syndicale ou non a elle aussi un impact sur la proportion de femmes élues.
En effet l’étude met en évidence que les listes non syndicales respectent relativement la parité puisque 46 % de femmes sont élues, alors que seules 32, 6 % de femmes sont élues de la liste CGT.
Ces taux ne sont que la traduction de l’implantation des syndicats dans les secteurs et dans les catégories de salariés (Tableau 4). La proportion de femmes élues parmi les listes de la CFTC est de 44,3 %. Ainsi la CFTC est particulièrement attentive et respectueuse de la parité et est présente dans les secteurs féminisés tels que le commerce ou les femmes représentent 49,4 % des salariés. A l’inverse, la CGT, mais aussi CGT-FO, ou CFE-CGC sont plutôt implantés dans des secteurs ou les hommes sont majoritairement représentés et de ce fait ont peu de femmes élues. Ces organisations, bien qu’encore loin de la parité ont malgré tout vu progresser de 7 à 11 point le nombre de femmes élues sur leurs listes (Tableau 3).
Il apparaît donc que les femmes restent le plus souvent élues dans des PME, sur des listes non syndicales et par conséquent dans des instances disposant de moyens limités comparés aux entreprises où se trouve une implantation syndicale.
Malgré l’évolution notoire du nombre de femmes élues entre 2001 et 2012, l’enquête REPONSE « toute choses égales par ailleurs » de 2011 a noté qu’une femme avait encore une probabilité inférieure de 20 % à un homme d’être représentante du personnel. Lorsqu’elles sont représentantes elles ont tendance à occuper les fonctions de délégué syndical dans 20 % des entreprises contre 30 % pour les hommes. Elles n’exercent qu’un seul mandat dans 63 % des établissements, contre 56 % pour les hommes, et ne cumulent de mandat que dans 15 % des cas (22 % pour les hommes).
Cela ne fait, en réalité, que reproduire le schéma interne des syndicats. En effet le taux de syndicalisation reste plus faible chez les femmes (7 %) que chez les hommes (10 %). Cela découle entre autre du fait que les femmes ont tendance à être présentes dans certains secteurs limités, des emplois peu qualifiés ou les syndicats ont du mal à s’implanter et à leur donner l’opportunité d‘accéder à la formation syndicale. En conséquence si le taux de syndicalisation des femmes a progressé, leur participation aux exécutifs syndicaux reste rare. Selon C.Guillaume et S.Pochic « les femmes et leurs intérêts restent sous-représentés dans les organisations syndicales marquées par une culture « masculine » [et] accèdent difficilement aux « positions les plus valorisées dans la hiérarchie syndicale ».
Cela est tout de même en cours d’évolution notamment au sein de la CFTC ou 42 % de femmes sont syndiquées contre 37 % à la CGT, et 30 % de femmes sont secrétaires générales de fédérations d’unions départementales contre 24 % à la GCT et 11 % à la CGT-FO.
De plus il existe une carence générale de candidature menant à ce que plus de la moitié des listes n’obtiennent qu’un élu, un quart d’entre elles deux et parfois même que certains établissements soient dépourvus de toute instance représentative. Cela ajoute une difficulté supplémentaire dans la réalisation de l’objectif de mixité cher à la CFTC cadre. Mais en 2012, si les hommes arrivaient souvent en tête de liste lorsque celles-ci n’obtenaient qu’un élu, les femmes arrivaient en tête dans 36 % de cas contre 26 % en 2001.
Si la loi n° 2001-397 du 9 mai 2001 relative à l’égalité professionnelle dite loi Génisson a imposé une négociation obligatoire triennale sur l’égalité professionnelle, et encourageait les organisations syndicales à améliorer la parité aux élections professionnelles et prud’homales (article L.2324-6 Code du travail), son efficacité est restée limitée. Une étude DARES a en effet relevé, suite à son entrée en vigueur, que les femmes ne représentaient à cette époque que 32 % des élus alors qu’elles correspondaient à 40 % de salariés.
La loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi dite Rebsamen a réitéré la tentative de mettre en place des mesures qui permettraient la réalisation de l’objectif d’une représentation équilibrée des femmes et des hommes en imposant le respect d’une composition des listes de candidats représentatives de la proportion de femmes et d’hommes parmi les salariés de l’entreprise concernée, et l’alternance femme/homme. Là encore l’efficacité reste limitée puisque ne prévoit la parité qu’au niveau des candidatures et donc ne permet d’avoir une proportion d’élus réellement représentatifs de l’organisation de l’entreprise.
De plus dans les entreprises ou l’implantation syndicale est faible ces obligations risquent de limiter l’efficacité de la représentation des salariés, puisqu’à défaut de salarié des deux sexes les listes peuvent être partiellement ou totalement invalidées. Cela pourrait mener les syndicats à faire des candidatures de formes pour respecter les obligations légales, mettant en péril la représentation des intérêts des salariés.
En conclusion la mixité au sein des instances représentatives tend à devenir une réalité, notamment grâce aux différentes interventions législatives en la matière. Pour autant l’objectif n’est pas encore atteint, et fait face à de nombreuses embûches en amont des élections professionnelles. Notamment l’absence, qui perdure, des femmes dans certains secteurs mais aussi l’organisation de certains syndicats eux-mêmes, et leur implantation variable au sein des secteurs ou sont présentes les femmes.
DARES Analyses février 2018 n°007
Pour retrouver l’étude complète : http://dares.travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/2018-007.pdf
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