Taux d’absentéisme
Étude : le taux d’absentéisme en 2017
Réhalto/BVA, cabinet expert des risques humains et sociaux publie chaque année une étude intitulée « Baromètre sur les arrêts de travail « comprendre pour agir » dont la quatrième édition est parue le lundi 18 juin 2018. Elle a été réalisée auprès de 305 directeurs des ressources humaines et 1 504 salariés en avril 2018 et s’intéresse au taux d’absentéisme, les raisons et la durée des arrêts mais aussi à leur impact sur l’entreprise et enfin aux actions mises en place pour les prévenir.
I. Un taux d’absentéisme en recul
L’étude part d’un premier constat celui du recul du taux d’absentéisme en 2017. Celui-ci, qui avait connu une progression constante de 2014 à 2016, a diminué de 0,7 points.
Il apparaît que 38 % des salariés ont été arrêtés au moins une fois en 2017, ce qui suppose à contrario que 62 % des salariés ne se sont jamais fait arrêter. Au total le taux d’absentéisme a été égal à 3,2 % en 2017 dans les entreprises de plus de 50 salariés en France contre 3,9 % en 2016.
Il est alors aisé de constater que contrairement aux idées reçues selon lesquelles l’absentéisme serait un fléau de grande ampleur, son taux est en réalité relativement bas.
D’ailleurs l’étude démontre que 43 % des salariés ne posent pas d’arrêts maladies bien qu’ils soient face à une difficulté le nécessitant. Dans cette situation les salariés poseront plutôt un congé (9 %) et le plus souvent iront au travail (34 %) notamment pour éviter de voir leur revenu baisser, mais aussi du fait de l’importance de leur charge de travail. Cela se constate souvent effectivement chez les cadres, qui ont déjà tendance à être réticent à prendre leurs congés ou à ne pas travailler pendant ces derniers, et le sont d’autant plus vis-à-vis des arrêts de travail.
II. Des différences notables en fonction des catégories de salariés
En effet l’étude observe qu’il existe des disparités au sein des catégories de salarié. Au regard de la catégorie professionnelle, il apparaît que les ouvriers (5,2 %) et les salariés travaillant dans le secteur de la construction (4,6 %) ont plus recourt aux arrêts maladies que les cadres (1 %) et les salariés des services (2,5 %).
Mais l’âge a lui aussi un impact puisque les salariés de 40 à 49 ans ont un taux supérieur d’absentéisme (3,9 %) que les moins de 30 ans (2,3 %).
On peut encore constater que ces taux restent assez faibles, mêmes pour les plus élevés. Par ailleurs les différences suivent une certaine logique, car en général l’état de santé des salariés de plus de 40 ans suppose plus de suivi et est moins bon qu’avant 30 ans, le fait que le taux d’arrêt de travail soit plus élevé pour les premiers est cohérent.
Concernant la catégorie professionnelle, là aussi les disparités sont cohérentes, puisqu’un ouvrier, et un salarié dans le secteur de la construction a plus de chance d’avoir un état de santé détérioré par le travail qu’un cadre ou qu’un salarié des services car « les cadres sont moins soumis aux risques professionnels (accidents, maladies, expositions à des produits toxiques, etc.) que les ouvriers », explique l’Insee.[1]
De surcroît il est établit que les arrêts pris sont majoritairement de courtes durées étant donné que 39 % des arrêts ont duré de 1 à 3 jours, 23 % des arrêts de 4 jours à 1 semaine, 31 % des arrêts ont une durée d’une semaine à 3 mois et 7 % sont des arrêts longs (supérieur à 3 mois). En moyenne les salariés ont donc eu 11,6 jours d’arrêts sur l’année.
III. Les facteurs déterminants de l’absentéisme
Pour une majorité de DRH, ces arrêts de travail ont un impact négatif sur l’organisation de leur entreprise (79 %) et sur sa performance économique (59 %). Pour autant, ils sont seulement 17 % à pouvoir évaluer le coût de cet impact.
Si ces arrêts sont considérés comme ayant un impact négatif sur l’entreprise c’est parfois l’entreprise qui a un impact négatif sur le salarié le poussant à devoir prendre un arrêt. En outre, l’augmentation du taux d’arrêt de travail, au-delà d’inquiéter au regard de la marche de l’entreprise devrait inquiéter au regard de la santé des salariés.
En effet le climat social au sein des entreprises a un impact majeur sur les absences des salariés. Lorsque les salariés le considèrent bon, le taux d’absentéisme est de 2,6 %, mais lorsqu’ils le jugent très mauvais le taux est de 5,8 %.
Par ailleurs 25 % des salariés ayant été en arrêt, l’étaient pour une cause professionnelle. Du fait de tensions liées à l’organisation du travail (15 %) de difficultés liées aux pratiques managériales (10 %). Cette réalité est d’autant plus frappante puisque 59 % des salariés qui estiment le climat social au sein de leur entreprise est très mauvais ont eu recours à un arrêt maladie pour une cause professionnelle.
De plus, 6 % des salariés ont été arrêtés pour cause de burn-out. Les femmes (8 %), les plus jeunes (11 % des moins de 30 ans) et ceux qui travaillent en CDD (11 %) sont ceux qui ont le plus connu ce type d’arrêt en 2017, ce qui traduit de la pressions sur les salariés les plus précaires.
Face à ce constat seul 46 % des DRH témoignent que leur entreprise a mis en place des actions de prévention. Celles-ci, lorsqu’elles sont mises en place, ne sont souvent qu’issues des textes légaux et donc obligatoires pour l’employeur et concernent l’évaluation de la pénibilité au travail.[2]
IV. Les solutions potentielles
L’étude elle préconise la mise en place du télétravail comme moyen de limiter l’absentéisme, puisqu’elle constate que le taux d’absentéisme des salariés qui ont des possibilités de télétravail occasionnel est de 0,8 % contre 3,5 % pour les salariés qui n’ont pas de possibilités de télétravail.
Pour autant le recours au télétravail ne semble pas la solution la plus judicieuse. Cette solution n’aurait pour effet que de panser la plaie plutôt que la prévenir.
Aux vues de l’étude il apparaît que la façon la plus efficace de réduire l’absentéisme serait de faire en sorte que l’espace de travail soit sain pour le salarié, cela réduirait déjà le taux d’absentéisme du fait du mauvais climat social. Une meilleure organisation du travail et de la gestion managériale, est non seulement à la portée des entreprises et limiterait par la même occasion les risques de maladie pas forcément reconnue comme professionnelle mais trouvant sa cause au sein du travail. D’autant plus que l’employeur est tenu d’une obligation de santé et de sécurité au travail.[3]
Il conviendrait donc, pour l’employeur de mettre en place une « prévention suffisamment précoce des facteurs de dégradation des conditions de travail entendus au sens large : ambiances physiques mais aussi organisation du travail, qualité de la relation d’emploi, conciliation des temps professionnel et privé, etc » comme l’explique le réseau Anact-Aract qui met l’accent sur « la liaison de l’absentéisme avec les conditions de travail et la nécessité de le prévenir avant sa survenance. »
D’ailleurs l’étude démontre que « 62 % des salariés ayant connu un arrêt long (plus de 3 mois) expriment un besoin d’accompagnement par leur entreprise. 26 % de ces derniers attendent davantage d’écoute et de considération de la part de leur supérieur, 19 % évoquent un suivi de leur état de santé par leur entreprise et 14 % souhaitent bénéficier d’un soutien psychologique. »
Par ailleurs il ne faut pas chercher à éradiquer tout arrêt maladie, car ces derniers sont nécessaires aux salariés lorsqu’ils se trouvent dans une situation ou leur santé est en péril. Chercher à dissuader les salariés de toute absence pourrait avoir un effet néfaste sur ces derniers pouvant augmenter les risques de burn-out.
Concernant les arrêts de complaisances, pratique qui apparait finalement assez résiduelle, les mécanismes de délai de carence[4] en matière d’indemnisation et la possibilité pour l’employeur de réaliser une contre-visite médicale[5] ont une certaine effectivité concernant le pan « contrôle » et « sanction », il conviendrait désormais de développer le pan « prévention ». En effet, il apparaît que seul 23,6 % des entreprises ont mis en place des mesures de préventions collectives, et 21,8 % des mesures de préventions individuelles, selon une étude de la DARES.[6]
Retrouvez l’étude sur http://www.rehalto.com/fr/actualites/resultats-de-la-4eme-enquete-bva-rehalto-sur-les-arrets-de-travail/
[1] Etude de l’INSEE « Les hommes cadres vivent toujours 6 ans de plus que les hommes ouvriers » https://www.insee.fr/fr/statistiques/1908110
[2] Article R.4121-1 du code du travail et suivant
[3] Article L.4121-1 du code du travail et suivant
[4] Article L.323-1 du Code de la Sécurité sociale
[5] Article L. 1226-1 du Code du travail
[6] Enquête « Conditions de travail » auprès des employeurs : résultats détaillés. http://dares.travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/synthese.stat_no23_-_enquete_ct_volet_employeurs.pdf